Pourquoi les taxis parisiens sont des cons

Quiconque a un jour interpellé Uber, Heetch et autres Chauffeur Privé sur les réseaux sociaux a forcément déjà vu débouler dans ses notifications la horde des taxis numérisés, tels des rageux masqués sur un forum obscur du 15-18. Se servant de toutes les plaintes des clients, ses comptes trolls aux biographies évocatrices (« anti-VTC » « macronisation de l’économie » etc.) racontent comment, contrairement à l’idée de ses crétins de clients qui les utilisent, ces services de VTC sont tout nazes. Et que finalement, bah les taxis c’est cool.
Bah non les gars, malgré tous vos arguments, vous êtes tous des crétins. Et voila pourquoi, en suivant chacun de vos arguments à la con.

Les VTC maraudent

Ah, la fameuse rumeur qui voudrait que les VTC tournent et accostent des clients au hasard des rues… Je passe ma vie dans Paris, et de toute ma vie je n’ai JAMAIS été accosté par le moindre VTC (appli ou autre). Jamais… D’ailleurs, les chauffeurs ne viennent que s’ils ont été appelés via téléphone ou application, et vérifie l’identité du client. Par contre, j’ai été plus d’une fois refusé par des taxis sous prétexte que j’habitais en petite couronne ou dans une direction qui ne leur allaient pas (c’est illégal, un taxi se doit de charger le client qui se présente à lui, peu importe sa destination). Par contre, bien avant la guéguérre VTC/taxis, les aéroports grouillaient déjà de chauffeurs qui se proposaient de ramener des voyageurs à Paris, en dehors de tout cadre légal. Ils sont toujours là d’ailleurs. Ils ne sont ni VTC, ni taxis. Mais ça, ça emmerde personne.

Les applis de VTC précarisent l’emploi

C’est vrai. En employant pour la plupart des chauffeurs auto-entrepreneurs, statut qui n’a jamais été pensé pour être un emploi à temps complet, les sociétés de VTC leur imposent d’entreprendre alors qu’ils créent surtout de la richesse pour le compte de l’entreprise qui leur donne leurs courses. Sauf que les taxis oublient de dire qu’il y ont eux-mêmes trois statuts très différents. Les salariés (principalement dans les 3 grandes entreprises que sont G7, Taxis Bleus et Alpha Taxi) qui travaillent huit heures par jour pour un salaire fixe, qui sont les moins nombreux, et qui travaillent surtout pour des services premium. Les artisans, qui ont leur propre véhicule et leur propre licence, qui sont des entrepreneurs… comme les chauffeurs VTC. Ils payent des charges à la fois sur leurs revenus et sur leurs véhicules. Et le plus souvent, ils sont affiliés à des radios qui leur filent du taf, radios auxquelles ils reversent de la thune comme un con de VTC. Bah ouais… Et j’ai gardé le meilleur statut pour la fin, les locataires. Alors mon poto, si tu sais pas ce qu’est un taxi locataire tu vas te marrer. Imagine, tu bosses pour une boite. Mais tous les matins, pour entrer dans la boite, tu dois payer ton bureau, ton ordinateur et ton internet. Et en cas de problème tu te démerdes avec. Alors ton ordinateur t’apportes un peu de boulot. Par contre si t’en as pas assez, tant pis pour ta gueule. Bah c’est le principe des taxis locataires. Ils n’ont pas de statut précaire parce qu’ils n’ont même pas de statut du tout. Ils ont juste le droit de filer de la thune à leur bailleur, en espérant à la fin de la journée avoir gagner assez d’argent pour rembourser leur loc’ du jour, et dégager des bénéfices pour bouffer (et payer le carburant, parce que bien sur, ça c’est pas dans la loc’ faut pas déconner). Et à ton avis, qui est le premier loueur de taxi à Paris ? Bah G7 bien sur. Et contrairement aux chauffeurs, les bagnoles travaillent 3 x 8H par jour. C’est bien plus rentable.

Les VTC appliquent des tarifs aléatoires

Alors là, tu vas entendre tout et n’importe quoi. Certains vont te dire « ouiiiii tout çaaaaa ils utilisent pas de compteuuuuur, du coup c’est n’importe quoiiiiii ». Et d’autres vont te dire « ouiiii tout çaaaa, ils utilisent un compteuuuuur, alors que c’est réservé aux taxiiiiiis ». Bon, bref, les deux existent. Mais dans tous les cas, tu peux toujours estimer combien tu vas raquer à peu près, tu peux choisir un servir qui te fixe le montant dans la course ou d’autres qui font ça au compteur. C’est cool le choix en fait. Mais chez les taxis y’a pas ça. Non. T’as juste le droit de payer si y’a trop de gens dans la bagnole et pour foutre un bagage dans le coffre.

Uber tue la concurrence

Que les débats se résument autour d’Uber est un fait. Principalement médiatique d’ailleurs. Pour autant, il existe une multitude d’alternatives, plus d’une dizaine juste pour les VTC par application mobile. Quant aux taxis ? G7 possèdent plusieurs milliers de taxis affiliés et… son principal concurrent Les Taxis Bleus qu’il a racheté dans une opacité financière brillamment mise à jour par Dominique Nora pour finalement représenter plus de 10 000 taxis via leur centrale radio sur à peine 15 000 véhicules à Paris. Soit 66% du marché. Et histoire d’être sur de niquer le marché à donf’, G7 vend des formations de taxi, gère une sorte de bourse aux licences, et possède Taxirama et Gamma, deux des plus grandes entreprises qui équipent les taxis (de compteur, des petites loupiottes sur le toit etc.). Sacré marché concurrentiel.

Les VTC fraudent

Qu’on parle d’évasion fiscale pour des sociétés comme Uber (et tous ses gros copains du web installés entre Dublin et Amsterdam) fait sens. Les chauffeurs eux, sont soumis aux mêmes charges que n’importe quel entrepreneur et doivent déclarer leurs revenus puisque tout est facturés à leur(s) société(s) référentes… ce qui n’est pas le cas de tous les chauffeurs. Parce que si les terminaux de CB marchent aussi souvent dans les taxis, ce n’est pas tant pour éviter de payer le coût par transaction que pour faire transiter de l’argent en liquide, comme les pourliches si souvent réclamés qui n’apparaissent jamais sur les justificatifs de course. Ni aucun justificatif d’ailleurs.

Les VTC ne payent pas leur licence

Bonne nouvelle pour tous les taxis ! La licence (dont la suppression ou l’augmentation du nombre a créé des blocages monumentaux à l’époque Attali/Sarkozy), c’est à dire l’ « autorisation de stationnement de taxi » est gratuite. Oui, gratuit. Gratos. Même pas dix balles. Ketchi. Alors me direz vous, « bah pourquoi qui gueulent ? ». Bah tout simplement ma bonne dame parce que leur nombre étant limité (aucune licence attribuée en 1990 et 2002 par exemple), et la licence étant cédable, les gros malins se sont dit qu’ils allaient se la refourguer quand ils auraient fini, histoire de s’assurer une retraire. Qui achète en priorité ? Allez, je te le donne en 200 000, comme le cours actuel… c’est G7. Parce que la location de licence est une de leur activité, qui rapporte 29M€ par an pour un peu moins de 800 plaques. Alors oui les copains, la licence est chère. Mais uniquement parce que vous le voulez bien.

Le service VTC finalement c’est nul

C’est faux. Non seulement le service ne s’est pas dégradé (il y a juste plus d’utilisateurs, plus de chauffeurs, donc, mathématiquement plus de problèmes, et plus d’abrutis pour les retweeter), mais surtout les VTC offrent un service client qu’aucun taxi (et encore moins cette vaste blague qu’est le service de contrôle des taxis rue des Morillons) ne propose. Chaque client qui se retrouve face à un problème est pris en charge, dédommagé ou remboursé. Le plus souvent sans même avoir à justifier outre mesure. Là où la totalité des mes recommandés à la préfecture et aux Morillons sont restés sans réponse.

Les chauffeurs VTC ne connaissent pas Paris

Alors vu le nombre de fois où j’ai fait répété une adresse à un taxi pour aller à côté de Bastille, ou de mecs qui m’ont mis le GPS pour faire Gare de l’Est-Ménilmontant, je me dis que je préfère largement foutre mon adresse dans une application qui va automatiquement filer l’itinéraire à mon chauffeur via un truc qui va éviter les embouteillages. Et au moins je serai pas obligé de me taper RMC pendant une demie heure.

Benjamin Charles

Photographe, réalisateur, consultant social media & content

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