Droits relatifs

J’ai vu passer en quelques jours plusieurs histoires de créateurs de contenus vidéos (youtubeurs et viners notamment) mécontents de voir leurs travaux détournés. Et ils ont raison. Avner Peres (signé chez Melberries) en a d’ailleurs fait une vidéo où il explique en quelques minutes la mésaventure type : un contenu un peu viral, rapidement reuploadé sur divers comptes YouTube, Dailymotion ainsi que sur les players intégrés des sites dits « de buzz », qui ne sont que la version internet des célèbres « bétisiers du net » (dont l’incontournable Zap de D8) best-of de contenus mis bout à bout sans en rémunérer les auteurs. Dans la même période, la youtubeuse lifestyle EmmaCakeUp mettait en ligne un best-of de ses 17 vines préférés avec 17 vidéos mises intégralement en ligne sans que leurs auteurs ne soient rémunérés (alors qu’elle même a été rémunérée pour les 417K vues générées).

Tous les débats entourant ces histoires (j’en ai volontairement mis de côté beaucoup d’autres) ont finalement le même point d’attache : la monétisation des contenus. Parce qu’une vidéo qui n’est pas sur la chaîne de l’auteur n’est pas monétisée par son network (bien qu’à travers un outil, le network pourrait très bien soit effacer, soit bloquer, soit monétiser un contenu qui est sur un autre chaîne s’il en a la paternité). Quand les créateurs réclament la suppression des vidéos sur les sites internet il leur est répondu que finalement c’est pas si mal pour eux, et que ça leur fait de la pub. Je ne compte plus le nombre de groupes et de labels qui m’ont dit ça lors qu’ils voulaient utiliser gratuitement mes photos pour leur promo. Finalement ils les ont achetés, et toutes mes publications ne m’ont jamais apporté le moindre client.

Ainsi donc, ils ont raison ces créateurs de défendre leurs droits et leurs propriétés intellectuelles, que ce soit leur métier ou non, qu’ils soient jeunes ou vieux, parce que la paternité d’une oeuvre ne dépend pas de l’utilisation qu’en fait son créateur. Mais on peut difficilement demander le respect de ses œuvres (en obligeant la source unique, en réclamant la citation du nom, en faisant du financement participatif etc.) sans respecter celui des autres. Ce que peu de créateurs semblent accepter.

Suivant nombre de créateurs, je crois régulièrement des débats sur deux points assez étonnants : les musiques, les logiciels. Parce que ceux qui gueulent à longueur de journée sur leur monétisation et leurs droits n’en souvent que faire de ceux des autres. Combien de fois ai-je vu un créateur se plaindre d’un claim (revendication) de son contenu par un éditeur musical parce qu’il avait utilisé une musique dont il n’avait pas les droits. Parce que lui a le droit d’utiliser les œuvres des autres, et pas l’inverse. Pire, combien de créateurs montent et éditeurs leurs vidéos avec des logiciels ou plugins piratés ? Là encore c’est du piratage. Non seulement il est ignoré mais il est à bien plus vaste échelle que ce qu’ils dénoncent.

Le droit des auteurs ne peut exister sans le respect des auteurs entre eux et prise de conscience de la création dans son ensemble. On n’est pas créateur parce qu’on devient connu ou qu’on est plus vus que les autres mais simplement parce que l’on créé. La création est nativement protégée par la loi. Alors, avant de revendiquer ses droits, parfois faudrait il vérifier qu’on n’empiète pas ceux des autres.

PS : utiliser la photo d’Avner en cover de cet article est un excellent exemple de créateur de contenu qui s’en bat un peu les couilles du droit des autres alors qu’il prétend défendre le sien.

Benjamin Charles

Photographe, réalisateur, consultant social media & content

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